Maman, je voudrais que tu sois comme avant, avec les cheveux bruns et plus longs, tu sais, comme tu avais avant.
Ma fille cadette (8 ans) m'adresse souvent cette demande qui me désarme. Je réponds toujours la même chose... "mais ma puce, tu te rends bien compte que je ne serai plus jamais comme avant, non?". Oui, elle comprend. Pour autant, elle n'accepte pas vraiment et nos échanges sur le sujet ne sont pas un vrai dialogue. Ils me font penser à une voiture qui patine sur la neige et n'arrive pas à trouver de point d'accrochage pour se réorienter et reprendre la route.
Je me sens impuissante à expliquer... et quand bien même, je ne crois pas que ce soit une question de compréhension intellectuelle, mais plutôt d'une forme de refus que ce qui m'est arrivé soit à ce point indélébile, malgré la reprise d'une vie presque normale. C'est comme si le fait d'avoir traversé l'épreuve ne rendait pas cette dernière moins injuste à ses yeux.
De mon côté, j'essaie au contraire de dépasser ce constat. Je m'applique à voir que je suis sortie de ces moments qui, certes m'ont changée à jamais, mais m'ont aussi laissée vivante et désireuse de changer des choses dans ma vie. C'est pour ça que c'est éprouvant pour moi que ma fille me tende toujours et encore ce miroir du passé et j'ignore comment lui répondre mieux, de façon plus ample, sans non plus déverser tous les "jamais plus" de mon coeur sur elle.
Peut-être que la seule réponse est à trouver dans le temps, pour moi comme pour elle.... Peut-être aussi que là où elle voit une fêlure, elle ne verra, avec les années qu'une continuité. Ou peut-être qu'un jour elle comprendra que ne pas retourner vers celle que j'étais, était la condition pour qu'advienne ce papillon que je m'efforce de devenir.
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